Exclusion et réclusion des fils et figure paternelle dans la problématique migratoire

The Father figure and the exclusion and seclusion of the son in the migration process

¹ Maître de Conférences des Universités, Psychologie interculturelle, Laboratoire Cliniques Psychopathologique et Interculturelle (LCPI), Université Toulouse Le Mirail, 5 allées Antonio Machado, 31058 Toulouse Cedex 9, France
² Docteur en Psychologie clinique interculturelle, Thérapeute familial, Chercheur associé au Laboratoire LCPI, 52 rue Turenne, 33000 Bordeaux, France
³ MCF HDR Honoraire en psychologie clinique interculturelle, chercheur LCPI, Université Toulouse le Mirail, LCPI, 5 allées Antonio Machado, 31058 Toulouse Cedex 9 France

^* zohra.guerraoui@free.fr
^** ivy.daure@orange.fr
^*** coulon.reveyrand@wanadoo.fr

Résumé

Au travers d’entretiens et de groupes de paroles, adolescents et jeunes adultes incarcérés, exclus de et reclus par la société, nous disent leur relation complexe à leurs pères. Apparaît fortement leur difficulté à se construire en tant qu’adultes, à s’identifier à la figure paternelle, dans des relations à des pères fragilisés, stigmatisés dans une société qui les décrit comme de mauvais pères. Ces fils se montrent prisonniers de leur propre ambivalence, tiraillés entre loyauté filiale et désir de s’y soustraire. Ils nous donnent à voir des pères tour à tour inégalables ou/et iniques. Pourquoi cette difficulté, à loi du père, la loi sociale ? Quel sens donner à leurs transgressions ? Qu’est-ce qui a fait défaut dans la transmission ? Cet article tente d’apporter des réponses à ces questions, à partir de deux recherches, l’une en milieu fermé éducatif auprès d’adolescents, l’autre en prison auprès de jeunes adultes, en analysant les modalités des liens, les mouvements identificatoires (identification négative), les rejets, les ambivalences, que ces jeunes incarcérés traduisent dans leurs rapports à leurs pères.

Abstract

In interviews and focus groups with male adolescents and young adults in prison, we learned about the complex relationship they have with their fathers. We found severe difficulties to construct an adult identity, as well as difficulties in identifying with the father figure. The relationship to the father appeared as being strongly influenced by the father’s fragility, byt also by stigmatizing representations of the “bad father”. The young interviewees seemed to be imprisoned by their own ambivalence, torn between filial allegiance and the desire to escape from loyalty. They described their fathers alternately as being unmatchable and/or inequitable. Why do we find this difficulty in dealing with the Law-of-the-Father with the rules of society? What is the sense of these young males’ transgressions? What was lacking in intergenerational transmission? In this paper, we try to give an answer to these questions while using material from two research projects we made in a prison and in a closed institution for delinquent adolescent minors. We analyzed the way the young participants talked about their relationship to their father, how they identified, mostly in a negative way, with many ambivalences, refusal and denial of the father figure.