La compliance du patient réanimé en soins intensifs : une procédure d'ex-cription du sujet

Compliance of the resuscitated patient in intensive care : a process of “ex-scription” for the subject

Docteur en psychopathologie clinique, Chargé d’enseignement à l’université Jules-Verne d’Amiens, Chargé d’enseignement à l’université Paris VII, Psychologue clinicien Centre Hépato-biliaire, Hôpital Paul-Brousse (Villejuif), Service de Psychiatrie Infanto-juvénile, Hôpital Simone Veil (Montmorency) 12, rue Salvador Allende 92000 Nanterre, France.

Résumé

La souffrance en soins intensifs et réanimatoires excède les seules épreuves de la maladie et des soins. En particulier, la demande de compliance adressée aux patients pourrait éclairer la psychopathologie spécifique de ces services, d’ordre traumatique et identificatoire. Dans ce contexte, la «compliance» désigne les différentes procédures de médicalisation impliquant une sujétion à l’organisation soignante engagée sur la voie d’une maîtrise technique toujours plus performante. Cette contrainte désapproprie le patient de ses prérogatives de sujet de la parole, pour tenter d’atteindre l’idéal du «sujet médicalisé», c’est-à-dire aboli. Elle induit notamment l’effacement des traces de la subjectivité et la déliaison des cohésions psychiques en visant l’intériorisation d’un discours d’autorité et de ses symboles : interdit de réciprocité, exclusion de la subjectivité et abolition du pouvoir de métaphorisation du vécu. La notion d’ex-cription résume les modalités de ces procédures de désubjectivation comme attaque des liens et désaffiliation symbolique.

Abstract

In intensive care and resuscitation, suffering oversteps the pain caused by disease and its treatment. Notably, the necessity for the patient to comply may well provide light on the specific traumatic and identificatory psychopathology in such specialised departments. In this context, “compliance” designates the various medicinal procedures that imply subjection to the health care organisation constantly under pressure to improve its performance and technical mastership. In an attempt to obtain the ideal “medicalised pearson”, this constraint deposesses the patient of his/her prerogatives as the subject of dialogue, i.e., abolishes the pearson. It also leads to the deletion of traces of subjectivity and the de-liaison of mental cohesion by targeting the interiorisation of an authoritive dialogue and its symbols : inhibiting reciprocity, excluding subjectivity and abolishing the capacity to metaphorise the patient’s history. The notion of “excription” summarises the modalities of these de-subjectivation procedures, as an attack on the links and symbolic dissaffiliation.