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Perspectives Psy
Volume 50, Numéro 1, janvier-mars 2011
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Page(s) | 7 - 9 | |
Section | Hommages | |
DOI | https://doi.org/10.1051/ppsy/2011501007 | |
Publié en ligne | 24 mai 2011 |
Yann du Pasquier (17 avril 1935 - 4 octobre 2010)
Un psychiatre-psychanalyste engagé
A tribute to Yann du Pasquier M.D. (April 17, 1935 - October 4, 2010)
A committed psychiatrist-psychoanalyst
Membre de la Société Psychanalytique de Paris, Ancien Chef de Service du 1 er Secteur de Psychiatrie Infanto-Juvénile de Paris, France
Reprenant la phrase de Goethe, Freud écrivait : « Ce que tes aïeux t’ont légué en héritage, gagne-le pour le transmettre. »
La vie personnelle et professionnelle toute entière de Yann du Pasquier est contenue dans ces termes.
À l’âge de neuf ans, ayant perdu son père, tué par l’un de ses patients, il est très précocement confronté à la mort. Vouant à ce père disparu une admiration sans bornes, il en garde toute sa vie le souvenir d’un homme luttant pour son idéal professionnel (il fut médecin des Gitans en 1944, dans un camp, à Saumur, 49).
Yann du Pasquier débute sa scolarité dans son Anjou natal (Montreuil Bellay, 49), puis, bénéficiant d’une bourse de la part du Conseil de l’Ordre des Médecins, il entreprend ses études de médecine à Angers (il venait de perdre sa mère, décédée dans ses bras, alors qu’il avait 18 ans.) D’abord reçu à l’Externat en Médecine des Hôpitaux d’Angers, il est nommé en 1959 à l’Externat en Médecine des Hôpitaux de Paris. Son premier stage en neurologie est pour lui un moment très important. Il aimait à rappeler, quelques années plus tard, les paroles du Professeur Raymond Garcin concernant la violence insupportable vécue par les malades souffrant du syndrome thalamique, dont il fut lui-même atteint en 1995.
Nommé en 1965 au Concours de l’Internat en Médecine des Hôpitaux Psychiatriques de la Seine, il passe progressivement de la neurologie (Docteur Sigwald) à la psychiatrie prestigieuse de son maître le Docteur Georges Daumezon. Il avait été auparavant un interne admiratif de la regrettée Docteur Hélène Chaigneau (1919-2010) qui l’avait initié à l’approche institutionnelle de la pratique communautaire de la psychiatrie de secteur, au Centre Hospitalier Spécialisé de Ville Evrard (93).
En 1969, il est admis au Concours du Médicat des Hôpitaux Psychiatriques, et il prend aussitôt ses fonctions tout naturellement en qualité d’assistant, à l’Hôpital Sainte Anne à Paris, dans le service du Docteur Daumezon. C’est ainsi qu’il accomplit un long assistanat en psychiatrie adulte, à proximité de l’Hôpital Henri Rousselle où il se forme simultanément à la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent auprès du Docteur Pierre Mâle. Ce dernier le sensibilise tout particulièrement à l’approche psychanalytique en psychiatrie des adolescents, aux côtés du Docteur Pierre Bourdier, qui avait été son psychanalyste dans le cadre de sa formation psychanalytique à la Société Psychanalytique de Paris. Intégré dans le cadre des Psychiatres des Hôpitaux, il devient chef de service et de secteur de psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (Intersecteur A du Val de Marne) au Centre Hospitalier Spécialisé de la Queue en Brie (94) où il crée plusieurs structures de soins pour enfants dont l’Hôpital de Jour du Perreux. Madame le Docteur Marilyn Vinograde lui succède en 1989.
La formation psychanalytique de Yann du Pasquier est particulièrement diversifiée et exemplaire : il appartient au groupe du Docteur Claude Le Guen, psychanalyste titulaire de la Société Psychanalytique de Paris, avec lequel il contribue à la rédaction d’un rapport publié en 1986 dans le Numéro 1 du Tome L de la Revue Française de Psychanalyse sur « Le Refoulement » présenté au 45e Congrès de Paris des Psychanalystes de Langue Française des Pays Romans, tenu du 16 au 19 mai 1985. Il suit également une formation avec le Docteur Pierre Luquet, psychanalyste de grand renom, avec lequel il développe une amitié très profonde. C’est ainsi que lui, le marin, s’initie au tir à l’arc avec ce que Pierre Luquet appelait « la méthode zen ».
Appartenant à un groupe de psychanalyse et d’anthropologie co-organisé par le Docteur François Sacco, il lui arrive de ramper dans la Grotte Chauvet, tout près de Lascaux. Il n’avait pas attendu cette période pour développer ses qualités artistiques et notamment de dessin figuratif, avant de s’adonner à l’aquarelle avec succès.
Membre affilié puis adhérent de la Société Psychanalytique de Paris de 1987 à 2008, il met en place un certain nombre de séminaires de psychanalyse en psychiatrie, aux côtés de membres titulaires éminents de la même société, notamment Madame Jacqueline Schaeffer.
Le Docteur Yann du Pasquier participe, en outre, parmi d’autres écrits, avec le Professeur Serge Lebovici, René Diatkine et Michel Soule, à la rédaction du « Traité de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent » publié aux Presses Universitaires de France en 1985 (article co-signé avec Raymond Cahn et Serge Lebovici intitulé : « Le pronostic en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Les études longitudinales et catamnestiques ») (volume 2, pages 821 à 841). De tous ses travaux, son article princeps intitulé : « Mères déprimées ou endeuillées et leurs enfants », sur la souffrance des enfants de parents malades mentaux, publié en 1986 dans la revue Perspectives Psychiatriques (Nouvelle série, numéro 71), laissera la plus grande trace. C’est en effet, en quelque sorte, un article fondateur, à l’origine de la nouvelle unité qui a vu le jour le 19 octobre 2010 à l’Hôpital Sainte Anne, destinée aux soins des mères et futures mères suivies en psychiatrie, coordonnée par une équipe de psychiatres d’adultes et Madame le Docteur Marie-Odile Perouse de Montclos, pédopsychiatre, qui lui a succédé dans le service de l’Hôpital Sainte Anne du 14e arrondissement de Paris en 2002.
Yann du Pasquier a, toute sa vie, manifesté des qualités humaines hors du commun. Il développe, plus qu’aucun autre de sa génération, un travail d’équipe pluridisciplinaire dans la cité, en relation avec les partenaires de l’enfance et de l’adolescence. Il se dépense sans compter auprès d’une population particulièrement déshéritée, et met en place divers outils thérapeutiques appropriés à l’approche des jeunes psychotiques et autistes.
Candidat en 1989 à la chefferie de service du 8e Secteur de Psychiatrie Infanto-Juvénile de Paris, il est nommé parmi de nombreux autres collègues aux cursus également prestigieux. C’est ainsi qu’il s’engage non seulement dans le travail thérapeutique auprès des enfants et des adolescents du 14e arrondissement de Paris mais aussi qu’il se consacre pleinement aux activités d’enseignement, de formation et de recherche de l’établissement. Son implication dans le suivi thérapeutique des enfants en graves difficultés scolaires (notamment à « La Petite École » mise en place par le Docteur Pierre Bourdier) lui vaut le grade de Chevalier des Palmes Académiques en 1995.
À la suite de son premier accident de santé, après plusieurs mois de rééducation dans le Service de Médecine Physique et de Réadaptation du Professeur Michel Perrigot, à l’Hôpital de la Salpêtrière à Paris 13e, et avec l’accord du Professeur Olivier Lyon-Caen, Président du Comité Médical mandaté par la DRASS, il reprit progressivement et courageusement ses fonctions de chef de service, ce qui lui valut la profonde estime des équipes de l’établissement, des patients et de leurs familles, jusqu’à son départ à la retraite.
En 2001, un nouvel accident de santé et une nouvelle hospitalisation à la Salpêtrière vinrent le confronter encore une fois au champ des souffrances neurologiques. Tout en étant suivi en soins intensifs, il sut introduire des méthodes relationnelles institutionnelles, méconnues à cet endroit, qui furent très appréciées par les équipes et les patients. Lorsqu’il fut admis, du fait de la gravité de son état, à l’Hôpital Rossini (Sainte Perrine-Assistance Publique de Paris), le Docteur Yann du Pasquier, tout en continuant sa rééducation au long cours restait disponible aux autres, personnel soignant et patients. Quelques manifestations artistiques virent le jour dans cet hôpital, à son initiative. C’est là qu’il expira des suites de la longue maladie qu’il avait su affronter avec un courage qui force notre admiration.
En rendant hommage au Docteur Yann du Pasquier, nous voulons exprimer à Marie-Alice du Pasquier-Grall, à ses enfants Renaud et Aude et à ses petits-enfants, toute notre reconnaissance à son égard et leur témoigner notre amitié et notre profonde tristesse. ■
« Les sanglots longs des violons de l’automne blessent mon cœur d’une langueur monotone » (Paul Verlaine).
CRÉPUSCULES 9 octobre 2010
Comme une dernière caresse
Le soleil embaume nos joues,
Comme une dernière paresse
La vague encore fait la roue.
L’écume miroite de bulles,
Les mouettes posent des virgules.
Comme une dernière prière
Le vent chante de feuille en feuille,
Comme une dernière lumière,
Yeux mi-clos, l’âme se recueille.
Des ombres le conciliabule
Compte les pas d’une pendule.
Coule le temps sur le rivage
Comme une dernière chimère,
Et comme un tout dernier mirage
L’été au couchant prend la mer.
Un dernier songe, préambule
À d’autres rêves funambules.
Comme une dernière tendresse
Images, pensées déambulent,
Oui, comme une dernière ivresse,
Promesses d’autres crépuscules…
Et d’autres éclats de jeunesse
Qui, jour après jour, se bousculent
Dans un arc en ciel de sagesse
Sitôt que grand âge bascule.
Vers le suprême crépuscule.
Christian du Pasquier
© GEPPSS 2011
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