Numéro |
Perspectives Psy
Volume 47, Numéro 4, octobre-décembre 2008
|
|
---|---|---|
Page(s) | 317 - 318 | |
Section | Editorial | |
DOI | https://doi.org/10.1051/ppsy/2008474317 | |
Publié en ligne | 15 octobre 2008 |
Psychiatrie et médecine : prévention et suivi thérapeutique
Psychiatry and medicine: prevention and therapeutic follow-up
Psychiatre des Hôpitaux Honoraire, Rédacteur en chef de Perspectives Psy
Les soins aux malades psychiques et leur qualité donnent la mesure du respect qu’une nation porte à ses concitoyens en général et aux droits de l’homme en particulier. Bien des étapes ont été franchies depuis la promulgation de la législation particulière aux malades mentaux (aliénés dangereux pour eux-mêmes ou pour autrui : Loi du 30 juin 1838) et celle de 1990 sujette à révision. Parmi ces étapes et non la moindre, il convient de souligner l’étape « identitaire ». Il s’agit du temps qui a séparé la reconnaissance du fait psychiatrique par la Société avec la Loi de 1838 et la reconnaissance de la spécificité de la discipline psychiatrique plus de 132 ans plus tard par l’Université en France. Les conséquences de ce décalage temporel restent importantes pour l’image de la Psychiatrie et de la Santé Mentale non seulement dans l’opinion publique, ce qui n’est pas notre propos aujourd’hui mais sur la formation des médecins, c’est-à-dire sur leur compétence dans la spécialité.
Le temps consacré à l’enseignement et à la formation au cours des études médicales depuis la création de la spécialité en 1971 étant très limité, aurait pu être compensé par la formation médicale continue (FMC) et l’inscription dans des groupes de pairs (groupes Balint par exemple). Rien ne permet de le confirmer. Une autre modalité de recours des patients aux compétences d’un plus grand nombre de spécialistes s’est heurté à l’instauration du numerus clausus. Les effets de celui-ci, sur une discipline encore jeune, constituant le tiers des motifs de consultation de médecine générale, n’ont pas fini de se faire sentir. L’inflation des prescriptions de psychotropes par des praticiens généralistes sans référence à un étayage clinique et diagnostique psychiatrique pose un problème de santé publique qu’il convient d’aborder en faisant des propositions en direction des professionnels de santé dans leur ensemble, incluant les médecins prescripteurs dans un esprit d’équipes pluridisciplinaires librement choisies et reconnues.L’encouragement, voire l’incitation par les pouvoirs publics sous forme d’équipes librement cooptées serait bénéfique aux futurs patients tant sur le plan des soins que de la prévention en médecine de ville notamment.
La prévention : un travail d’équipe
Parmi les nombreux motifs de surconsommation médicamenteuse de psychotropes, il convient de distinguer ceux qui sont liés aux patients et ceux qui émanent du praticien. Avant même d’en faire un inventaire force est de reconnaître l’isolement de cette dyade médecin-malade. Ce qui en médecine somatique, avec le colloque singulier confidentiel paraît une force de la relation, se révèle être une fragilité angoissante en matière psychofonctionnelle ou psychiatrique. Telle nous paraît la question sur les trois plans clinique, diagnostique et thérapeutique. C’est à la prévention résolument affirmée de ces difficultés institutionnelles que nous engageons nos lecteurs. En quoi consiste le malaise actuel des médecins confrontés aux malades psychiques ? Une absence de lisibilité scientifique, une absence de compréhension du fonctionnement psychique des malades névrotiques, psychotiques ou présentant des états-limites, l’ignorance partielle ou plus des effets thérapeutiques de leurs ordonnances des médicaments de l’esprit. Le fort taux de décès par suicide est-il à mettre en lien avec ce qui précède ?
Vers un dispositif de santé mentale de première ligne
Partant du constat qu’on ne prévient bien que ce que l’on connaît vraiment, il convient de donner aux membres des équipes soignantes de secteur psychiatrique un temps de travail auprès des praticiens de médecine générale. Il s’agirait tout à la fois d’intégrer une partie préventive de la santé mentale dans le dispositif de la santé en général et d’inclure cette dernière dans le suivi médical des malades psychiques. Ainsi, tout en accédant à la relation du médecin confronté à la souffrance psychique de certains de ses patients, le clinicien généraliste associé à un infirmier du territoire sectoriel de psychiatrie, pourrait limiter la prescription de psychotropes, voire s’en passer. Il pourrait aussi se passer d’avoir recours aux antidépresseurs majeurs lors d’un deuil non pathologique (S. Freud : Deuil et mélancolie). La pratique conjointe de la consultation généraliste-infirmier de secteur auprès de malades psychiques stabilisés, permettrait le suivi et le renouvellement de l’ordonnance dans un climat de confiance réciproque. Il en serait de même lors des visites à domicile en vue de la restauration des liens avec un ancien malade ou d’une première intervention auprès d’un ou d’une adolescente en crise suicidaire par exemple. Un certain nombre de ces propositions figurent dans les travaux que la Commission Couty doit remettre au ministre de la Santé avant la fin de l’année. Pour notre part, nous pensons que les acteurs de terrain de la santé et de la santé mentale pourraient sans attendre envisager la mise en place d’un dispositif ambulatoire de proximité alliant les compétences des uns et des autres. Il n’y aurait en effet que des avantages à réunir les praticiens libéraux et des membres du service public de psychiatrie. Ainsi serait mis en place un dispositif de santé mentale de première ligne dans l’intérêt des patients de tous âges.
© EDK, 2010
Les statistiques affichées correspondent au cumul d'une part des vues des résumés de l'article et d'autre part des vues et téléchargements de l'article plein-texte (PDF, Full-HTML, ePub... selon les formats disponibles) sur la platefome Vision4Press.
Les statistiques sont disponibles avec un délai de 48 à 96 heures et sont mises à jour quotidiennement en semaine.
Le chargement des statistiques peut être long.