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Foreword
Numéro
Perspectives Psy
Volume 46, Numéro 2, avril-juin 2007
Page(s) 113 - 114
Section Dossier : Infanticide
DOI https://doi.org/10.1051/ppsy/2007462113
Publié en ligne 15 avril 2007

L’infanticide est une définition juridique avant tout. Il s’agit de l’homicide volontaire d’un enfant, assassinat (avec préméditation) ou meurtre (sans préméditation). L’infanticide désigne aussi bien l’acte de tuer un enfant que la personne qui tue un enfant et spécialement un nouveau-né : par exemple une mère infanticide. Cet acte est relativement rare : environ 50 « infanticides » par an, jugés en France à reporter à 830 000 naissances par an, à relativiser par rapport à 100 homicides d’enfants par an, il semble que des infanticides restent ignorés et des morts d’enfant de moins de 3 mois restent inexpliquées. Cet acte a beaucoup diminué depuis la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse en 1975. Avant, il y avait 100 voire 200 infanticides par an au XIXe siècle. Nous sommes confrontés à un tel acte si nous sommes psychiatres d’adulte, d’enfant, si nous travaillons dans une maternité où de nombreuses situations à risque peuvent être traitées parfois très, trop rapidement, si nous travaillons dans des unités mère enfant s’adressant à des femmes psychologiquement fragiles, si nous travaillons dans des lieux d’incarcération, si nous devons juger ces femmes si nous sommes magistrat ou même si nous sommes jurés. En tant que psychiatre d’enfant, travaillant en gynéco obstétrique, il nous a fallu passer, dans notre pensée et notre système d’évaluation d’un système de prévention d’enfant en danger, de maltraitance (11 173 crimes et délits de maltraitance répertoriés en 2003, sur le territoire français, concernant des enfants), de carence, au saut qualitatif du risque de mort sur l’enfant. À travers ce dossier thématique de Perspectives Psy sur l’infanticide, nous essaierons de cerner cet acte qui nous bouleverse, via la psychopathologie conduisant à un tel acte visant son propre enfant. Nous demandons au lecteur d’être attentif, à ce qui va se lire. Si l’infanticide a une définition juridique, nous devons être sensibles aux conditions de la réalisation d’un tel acte. Il y a les actes posés, jugés, mais nous savons -psychiatres, psychologues psychanalystes -qu’ils sont sous-tendus par des pulsions, des fantasmes, des troubles psychologiques voire psychiatriques. Ce thème nous concerne tous, dans l’aléatoire de notre conception et de notre existence. N’entendons-nous pas : « Ai-je été désiré, ou n’ai-je pas été désiré mais ai-je tout de même été aimé ? J’aurais dû naître 6 ans auparavant lors de la première fausse couche spontanée de ma mère… ma mère perdait tous les garçons (par des fausses couches spontanées), je n’aurais pas dû naître… ». Ces questions sur l’origine, notre origine, cette angoisse nous permettent de comprendre les réactions médiatiques à de telles « affaires » où les commentaires vont de « l’impensable » à la « monstruosité » de la mère infanticide. Nous sommes identifiés à l’enfant, «l’infans » en nous.

Dans ce dossier thématique de Perspectives Psy, nous essaierons de connaître, de comprendre de tels parents faisant de tels actes, même s’il doivent être jugés. Le Docteur Claude Balier témoigne de son expérience de psychiatre en milieu carcéral auprès de criminels avec une réflexion théorique psychanalytique : « Des mouvements infanticides internes ». Il développera les fantasmes de tels patients d’avoir pu disparaître, du fait de leur mère. Le Docteur Jacques Constant, psychiatre expert nous permet de préciser les traits de personnalité de parents infanticides dans le cadre de ses expertises : « Quatre expertises d’infanticide, pratique d’expert, écoute de clinicien ». Il s’interroge sur les conditions de cet exercice. Il faut rappeler que l’infanticide touche toutes les catégories sociales et tous les niveaux intellectuels. Mme le Dr Anne Henry, Médecin chef de service à la SMPR de Rennes, nous fait part de sa réflexion théoricoclinique, d’inspiration psychanalytique, à propos du suivi psychiatrique et psychothérapique, de ces patientes infanticides incarcérées et jugées dans « Un témoignage clinique à propos des mères infanticides ».

Mme le Dr Blanche Massari, pédopsychiatre à l’Unité mère-enfant de l’hôpital intercommunal de Créteil, relate des suivis psychothérapiques de patientes après un infanticide jusqu’à une nouvelle grossesse et une naissance dans « Accompagnement vers une autre grossesse après un infanticide ». Mme le Dr Blandine Guettier, pédopsychiatre, intervenant dans le service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital de Gonesse, reprend l’histoire clinique sur plusieurs années d’une patiente ayant commis un infanticide (filicide), dans un contexte de troubles psychiatriques dans « Ambivalence dans la relation mère enfant intrication et désintrication pulsionnelle dans l’infanticide ». Une prévention est-elle possible ? Nous souhaitons que ces écrits éclairent les complexités de la relation mère-enfant, et que dans ces extrêmes nous comprenions davantage les processus originaires de troubles psychopathologiques de l’enfant : dont la psychose dans les aspects ambivalentiels, dépressifs, paradoxaux de la relation mère enfant entraînant la mort psychique de celui-ci, dont la maltraitance physique, sexuelle, mentale.


© EDK, 2010

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