L’adolescent, les parents et les psys

The adolescent, parents and psychiatrists

Professeur de Pédo-psychiatrie, Psychiatre Psychothérapeute, Ancien président de la FFP, ancien professeur à la Faculté de Médecine de Reims. Psychiatre libéral.

^* gerard.schmit.reims@orange.fr

Résumé

Cet article traite de l’aide pédopsychiatrique pour certains adolescents qui vont mal de façon prolongée et expriment leur souffrance par des symptômes externalisés (passages à l’acte, violence, tentatives de suicides...). Il insiste sur le fait que de tels adolescents sont en décalage avec les représentations socioculturelles les plus courantes concernant l’adolescence, parfois aussi avec celles de certains professionnels qu’ils rencontrent. Souvent, ils ne sont pas tant acteurs d’un processus d’autonomisation et d’affirmation de soi que prisonniers d’un blocage des liens intrafamiliaux. L’établissement d’un lien personnel avec eux peut s’avérer très difficile. Aussi leurs difficultés sont à considérer sous l’angle d’une « clinique de situation » prenant en compte le système d’appartenance de l’adolescent. Bien que l’incertitude évolutive soit importante, quelques éléments peuvent favoriser le projet de soins : l’accueil bienveillant d’une demande diffractée et portée par plusieurs personnes, l’implication des parents voire d’autres proches dans les consultations, la multiplicité et la diversité des soignants de façon à assurer la continuité des soins pour une durée suffisante. Une observation clinique de plusieurs années, centrée sur la description des étapes d’une prise en charge d’une adolescente, illustre ce propos. Elle montre aussi que le déroulement des soins ne répond pas à un projet défini à l’avance, mais est un cheminement qui se fait en fonction des événements et des évolutions qui se présentent. Comment réussir à accompagner l’errance de l’adolescent en créant avec lui et ses proches un groupe thérapeutique à la fois souple et solide ?

Abstract

This article deals with certain aspects of the pedopsychiatric care of those adolescents who have been feeling unwell for an extended period of time and express their suffering with externalized symptoms such as acting-out, violence, suicide attempts. It is noticed that such adolescents are at variance with the most common sociocultural representations of adolescence, sometimes too with those of some of the professionals that they meet. Often, they are not so much actors in a process of autonomisation or self-affirmation as prisoners of blocked family relationships.

Establishing a personal link with them can prove to be very difficult. Therefore their difficulties have to be considered from the perspective of a “clinic of situation “, taking into account the sense of belonging of the adolescents concerned. Although the outcome of the evolution is very unforseeable, some aspects can facilitate the implementation of treatment: a kindly welcome to a diffracted demand, made by several people; the involvement of parents or even other relatives in psychological consultations; the contribution of numerous and divers professionals in order to assure the continuity of care for an adequate amount of time.

The report of a clinical case of one teenage girl followed over four years, which centered on the description of the successive stages of care, illustrates this point. It shows too that the course of treatment did not respond to a pre-defined project, but was an organic progression which was largely shaped by events and changes arising. How can erring teenagers be successfully accompanied and how can a therapeutic group, both flexible and firm, be set up for them and their relatives?