Dans un contexte de politique de santé publique soutenant la mise en place et le développement d’équipes mobiles en psychiatrie, comme l’illustrent de nombreux rapports (dont le rapport annuel de la défenseure des droits, Madame Claire Hedon, rendu public le 20 novembre 2021 sur la santé mentale des enfants),etfaceàlaprésencedanslepaysage psychiatrique d’équipes mobiles de plus en plus nombreuses aujourd’hui, il est apparu nécessaire de consacrer un dossier aux équipes mobiles en psychiatrie. L’objectif général des équipes mobiles en psychiatrie est d’aller à la rencontre des personnes en souffrance psychique et de leurs familles (aller vers des populations vulnérables en difficulté, du bébé à l’adolescent jusqu’au sujet âgé, ne venant pas consulter dans les dispositifs de soins ambulatoires classiques) avec des missions d’évaluation, de soutien, d’accès aux soins, et/ou de soins selon les équipes. Les équipes mobiles sont particulièrement indiquées dans la clinique de la non-demande (difficulté à pouvoir élaborer, exprimer, et savoir où déposer une demande d’aide explicite), notamment dans les situations de précarité sociale et/ou psychique. Le mouvement « d’aller vers » offre l’intérêt de sortir les familles de leur isolement, de réinitialiser les liens, et de mobiliser des processus psychiques figés. La mobilité/flexibilité du cadre s’adapte aux besoins des familles, participe à la mobilisation de leurs compétences, et favorise l’alliance thérapeutique.

Parallèlement au développement depuis plus de 20 ans des équipes mobiles en psychiatrie qui s’est intensifié ces dernières années, l’Association des Équipes Mobiles en Psychiatrie (AEMP) a été créée lors du premier Congrès national des équipes mobiles à Lille en 2008, acte fondateur porté par Vincent Garcin et Sylvie Tordjman, avec le but de fédérer les équipes mobiles en psychiatrie. L’AEMP est à ce jour une association nationale mais aussi internationale (pays francophones) regroupant des professionnels des équipes mobiles et représentants des usagers, et concerne les équipes mobiles intervenant dans différents domaines de la psychiatrie : psychiatrie périnatale, psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, autisme, urgence et crise, psychiatrieprécarité, addictions, psychiatrie du sujet âgé. Elle a pour objectifs spécifiques de développer la réflexion clinique et la formation, les réseaux entre les soignants ayant une activité mobile dans le champ de la psychiatrie, et de promouvoir des initiatives institutionnelles.

La création en 2022 du DIU Équipes mobiles en santé mentale (Université de Paris Cité, Université de Rennes 1, et AEMP), première formation universitaire dédiée aux équipes mobiles, répond aux attentes des professionnels de santé mentale (psychiatres et pédopsychiatres, internes, psychologues, infirmiers, travailleurs sociaux) tant par rapport aux créations de nouvelles équipes mobiles que par rapport à la demande de redynamiser le fonctionnement de certaines équipes mobiles déjà en place en proposant un complément théorique et des manières différentes de penser et pratiquer la clinique de la mobilité. D’autres manifestations (congrès, visioconférences, formations, publications à disposition, etc.) sont organisées par l’AEMP et toutes les informations sont disponibles sur le site de l’AEMP : www.aempsy.com

Ce dossier sur les équipes mobiles en psychiatrie, coordonné par Sylvie Tordjman et Vincent Garcin, est composé de deux parties. La première partie du dossier permettra d’illustrer le fonctionnement de différentes équipes mobiles en psychiatrie qui interviennent aux divers âges de la vie, du bébé au sujet âgé en passant par l’enfance et l’adolescence. Un plan identique a été adopté pour les résumés des articles afin de mieux comprendre le fonctionnement de ces différents types d’équipes mobiles. Vincent Garcin, praticien hospitalier en pédopsychiatrie, a créé à Lille la première équipe mobile dédiée aux adolescents, et est le président d’honneur de l’AEMP (Association des Équipes Mobiles en Psychiatrie). Sylvie Tordjman est professeur en pédopsychiatrie, chef du Pôle Hospitalo-Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (PHUPEA) et la présidente de l’AEMP. Vincent Garcin précise d’emblée, dans la première partie de ce dossier, la définition relative aux équipes mobiles en psychiatrie. Il indique le besoin de constituer un cahier des charges (avec ses objectifs et les moyens nécessaires) afin de valoriser les équipes mobiles et permettre leur reconnaissance au titre des équipements des services. Puis, Dominique Brengard expose la longue gestation des équipes mobiles de périnatalité dont elle fut dès 1989 l’une des pionnières avant l’heure jusqu’à la création en 2021-2022 de 10 nouvelles équipes mobiles en psychiatrie périnatale. L’article qui suit, rédigé par Raphaël Curti, porte sur les équipes mobiles autisme. Raphaël Curti est référent des équipes mobiles autisme à l’AEMP, et responsable de l’équipe mobile autisme à Marseille au Centre hospitalier Valvert. Il est le président de l’association francophone des équipes mobiles autisme (AFUMA) qui se développent sur le territoire français (on en compte aujourd’hui plus de 50 sur l’ensemble du territoire métropolitain et d’outre-mer), pour moitié dans le champ sanitaire, et pour autre moitié dans le champ médico-social. Devant la diversité des équipes mobiles en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Sylvie Tordjman propose ensuite une synthèse portant sur leurs similitudes et différences, et souligne dans les perspectives l’importance de l’évaluation de nos pratiques d’équipe mobile et également de prendre soin des liens tant avec les partenaires qu’au sein de l’équipe mobile. Enfin, Cécile Hanon et Maxime Pace décrivent comment les Équipes Mobiles de Psychiatrie du sujet âgé (EMPSA) répondent, en se déplaçant au domicile ou en institution, à la difficulté d’accès aux soins des personnes âgées en souffrance psychique, liée à leur manque de mobilité, leur isolement, leur fragilité et préviennent les situations de rupture.

Enfin, la deuxième partie de ce dossier sur les équipes mobiles en psychiatrie sera centrée sur le thème de la crise, mobilité et processus de changement. Le prochain dossier abordera en effet les équipes mobiles sous l’angle de la crise comme fenêtre thérapeutique permettant de mettre en place des processus de changement passant par « l’aller vers » et la mobilité. Ce propos sera développé à partir de l’expérience de plusieurs équipes mobiles, dont notamment les équipes mobiles de crise et d’urgence (avec par exemple, l’Équipe Rapide d’Intervention de Crise-ERIC pour les adultes et adolescents, et l’Équipe Mobile d’Urgence Pédopsychiatrique-EMUP pour les jeunes de moins de 16 ans), les Équipes Mobiles Psychiatrie-Précarité-EMPP, ainsi que les équipes mobiles addictions et TCA (Troubles du Comportement Alimentaire).

Nous espérons que ce dossier permettra, avec ses deux parties, en soulignant les apports des équipes mobiles en psychiatrie mais aussi leurs conditions de bon fonctionnement, de contribuer au développement de nouvelles équipes mobiles en France et ailleurs... dans l’intérêt des personnes en souffrance psychique (du bébé au sujet âgé), de leurs familles, et de la société.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

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